SUIBOKUGA
A Propos
Le Suibokuga (la peinture à l’encre) ne consiste pas à représenter un objet tel quel, mais à en éliminer le superflu pour en saisir l'essence.
La peinture à l’encre en Chine est perçue comme épique (puissante et exprimant une vision de la vie), tandis que celle du Japon est considérée comme lyrique (douce et exprimant ce qui est ressenti).
En particulier, le Suibokuga japonaise exprime la profondeur de la nature et de la vie, les joies et tristesses, le concept de Wabi-Sabi (la beauté dans l’imperfection et l’éphémère), la quiétude, la simplicité, ainsi que l’humilité et l’esprit de paix propres aux Japonais, en lien avec l’esprit du Zen, capturant intensément l’âme de celui qui la contemple.
Importée à l’origine de Chine avec le bouddhisme Zen, elle a évolué à travers une longue histoire en tant qu’art Zen, s’intégrant progressivement aux valeurs morales et culturelles japonaises pour se développer de manière unique.
Le Suibokuga, caractérisé par l’élimination du superflu et l’utilisation habile de l’espace, emploie diverses techniques telles que les nuances de l’encre, les dégradés, les estompages, les effets de flou, et la variation de l’intensité du trait. Cela permet d’obtenir des œuvres à la fois simples et délicates.
Dans le Suibokuga, l’artiste commence par observer son sujet, puis le réinterprété dans son esprit pour créer un monde conforme à sa vision, en supprimant les détails superflus. Les sentiments et le message de l’artiste se reflètent alors dans l’œuvre.
Le monde en noir et blanc du Suibokuga est profondément enraciné dans l’âme japonaise, en résonance avec des cultures japonaise et dans l’esthétique Wabi-Sabi, qui valorise la sobriété et la simplicité, l’amour des changements et des émotions de la nature, et les arts tels que la cérémonie du thé et l’ikebana qui favorisent la sérénité et l’accueil.
C’est pourquoi le Suibokuga continue de fasciner les Japonais jusqu’à ce jour.

「枯木鳴鵙図」
(こぼくめいげきず)
宮本二天
(宮本武蔵 1584~1643)
”Koboku-meigeki-zu”
Miyamoto Niten
(Miyamoto Musashi 1584~1645)
Les trois grandes caractéristique du SUIBOKUGA

「蓮池水禽図」
(れんちすいきんず)
俵屋宗達
(17世紀前半)
”Renchi-Suikin-zu”
Tawaraya Sotatsu
(17th century)
1. Représenter l'Essence des Objets
La première caractéristique du Suibokuga, « abstraction et simplicité », réside dans l’abandon de la représentation réaliste pour viser à capturer l’essence du sujet.
L’artiste du Suibokuga cherche à transmettre la spiritualité intérieure ou la force vitale de la nature, sans être limité par l’apparence ou les détails des objets. Cette approche permet à l’artiste de communiquer ces éléments de manière concise et percutante. En renonçant à une représentation réaliste, l’œuvre dans son ensemble prend une impression de simplicité tout en conservant une puissance d’expression, offrant au spectateur une expérience esthétique unique.
Dans le Suibokuga, les détails fins des ombres et des lumières sont souvent volontairement omis. Cette réduction des détails superflus sert à accentuer le symbolisme et la spiritualité du sujet représenté.
Grâce à cette technique d’abstraction et de simplification, l'œuvre revêt une profondeur et une sérénité, créant un espace où l’imagination et les émotions intérieures du spectateur sont invitées à dialoguer et à s’exprimer.
2. Beauty of blank space
La deuxième caractéristique essentielle de le Suibokuga, « l’utilisation efficace de l’espace vide », est une technique qui intègre des « espaces vides » intentionnels pour stimuler l’imagination du spectateur.
Cet espace blanc n’est pas une simple absence de forme, mais remplit un rôle essentiel en tant qu’"espace" qui engage l’esprit du spectateur. En laissant délibérément certaines parties du tableau inachevées, la peinture acquiert une atmosphère de tension et de tranquillité, tout en mettant en valeur les éléments représentés et en dotant les espaces vides d’une vie et d’une ampleur propres.
Cette « beauté de l’espace vide » est enracinée dans la sensibilité esthétique de l’art japonais et est étroitement liée au concept zen de « beauté de l’incomplétude ». Cette philosophie suggère qu’en laissant intentionnellement quelque chose d’inaccompli, on éveille un sentiment de potentiel infini.
L’espace vide dans le Suibokuga incarne cette idée, offrant au spectateur un espace spirituel riche, au-delà du plan visuel.
L’ampleur et les possibilités infinies créées par cet espace vide apportent un équilibre entre silence et mouvement, tension et relâchement, offrant au spectateur une expérience profondément unique.
3. Toucher le cœur du spectateur
Le charme de le Suibokuga réside dans les expressions profondes créées par les "nuances" et la "tension" de l’encre. Bien que le Suibokuga soit réalisée en une seule couleur, elle englobe une gamme infinie d’expressions.
Grâce à des techniques telles que les nuances, les flous, les dégradés et la diffusion, ce qui semble être de l’encre noire éveille dans l’esprit du spectateur une palette de couleurs et d’émotions.
Le blanc du papier fait également partie de l'œuvre, et le contraste entre la profondeur de l’encre et la luminosité du papier crée des contrastes et une profondeur uniques. Cette technique permet aux spectateurs de percevoir une "palette de cinq couleurs" dans une seule couleur d’encre, en fonction de leur humeur et de leur sensibilité.
De plus, la réalisation d’un Suibokuga implique une forte tension.
Une fois que l’encre touche le papier, les corrections sont presque impossibles, ce qui exige une concentration et une détermination totales pour chaque coup de pinceau.
Cette caractéristique de "coup unique" transmet la concentration mentale et la force de l’artiste, et cette tension est également ressentie par le spectateur.
Ainsi, les expressions subtiles rendues possibles par les nuances d’encre, alliées à la concentration intense nécessaire pour peindre sans retouches, confèrent à le Suibokuga un impact puissant qui résonne avec les personnes qui l’observent.